Ethers de glycol : nouvelles données toxicologiques
Résumé
La réactualisation des données toxicologiques et épidémiologiques de l’expertisecollective de 1999 sur les éthers de glycol permet d’une part de confirmerles effets (hématoxicité, reprotoxicité…) de substances déjà étudiées et d’enrévéler de nouveaux ; d’autre part, cette réactualisation apporte des élémentssur des molécules pour lesquelles aucune donnée n’était publiée avant 1999.ToxicocinétiqueDu fait de leur caractère amphiphile, les éthers de glycol traversent facilementles membranes et se répartissent dans les compartiments aqueux et lipidiques.Absorbés de manière importante quelle que soit la voie de pénétration (orale,cutanée, pulmonaire), ils se distribuent dans la plupart des tissus biologiques, ycompris dans les tissus fœtaux. Cependant, les données précises de distributionrelatives à chaque éther de glycol restent éparses. Des études de distribution del’EGBE chez la souris ont permis de quantifier l’EGBE et ses métabolites dansdifférents compartiments gastriques. Des données issues d’études pharmacologiquesavec le DEGEE chez le rat confortent le fait que les éthers de glycol sedistribuent dans tous les tissus et notamment dans le foie, les reins et la moelleosseuse. Après absorption, les systèmes enzymatiques transforment les éthersde glycol en composés hydrosolubles plus facilement éliminés ou en métabolitesréactifs, responsables de manifestations toxiques. Néanmoins, concernantles dérivés di- ou triéthyléniques, la proportion des métabolites intermédaireset ultimes formés reste mal connue. Des études de toxicocinétique menéesavec le DEGEE chez le rat ont par exemple montré que le métabolite majoritaireest l’acide éthoxyéthoxyacétique (EEAA) et non le métabolite ultimeacide éthoxyacétique (EAA). Associé à des études de toxicité des métaboliteseux-mêmes, ce type de données permet d’une part de mieux évaluer le potentieltoxique du dérivé di- ou triéthylénique et de déterminer d’autre part lemétabolite à doser aux cours des études d'exposition humaine. HématotoxicitéConcernant les effets hématotoxiques des éthers de glycol, les donnéespubliées depuis 1999 ne modifient pas fondamentalement notre connaissancede ces effets et elles apportent quelques informations complémentaires 96utiles. Ces données confirment le caractère hémolysant de l’EGBE chez lerat et précisent l’histoire naturelle des accidents hémolytiques : ils sont précédéspar une diminution de la plasticité des hématies, leur déformation(sphérocytose, stomatocytose) et une augmentation du volume globulaire.Quand l’hémolyse est importante, elle se complique d’une coagulation intravasculaireresponsable de thromboses et d’infarctus disséminés, de précipitationd’hémoglobine dans les tubules rénaux entraînant une nécrose tubulaireet de l’apparition de foyers d’hématopoïèse extra-médullaires. L’hémolyseinduite par l’EGBE chez le rat n’a, en fait, aucun caractère spécifique et desphénomènes exactement semblables sont observés au cours de toutes lesmaladies hémolysantes, dont elle constitue un bon modèle animal. L’utilisationde ce modèle a déjà permis une meilleure compréhension des effets procoagulantsdes accidents hémolytiques. Par ailleurs, les publications récentesconfirment que c’est le principal métabolite de l’EGBE, l’acide butoxyacétique(BAA), qui est responsable de l’hémolyse. Les hématies humaines sonttrès résistantes aux effets hémolysants du BAA. Chez le rat, les femelles sontplus sensibles que les mâles aux effets de l’EGBE, mais cette particularité netraduit pas une plus grande fragilité de leurs hématies : elle résulte de différencestoxicocinétiques entre les deux sexes. Le mécanisme des effets del’EGBE sur les hématies n’est pas encore parfaitement élucidé, mais leprimum movens semble une entrée accrue de sodium et d’eau.Des données récemment publiées confirment aussi la capacité de l’EGiPE,de l’EGPhE et du DEGBE d’induire une hémolyse. Le pouvoir hémolysantde ces trois substances est toutefois moins marqué que celui de l’EGBE, etcelui de l’EGiPE est beaucoup plus important que celui de l’EGPhE ou duDEGBE. Une étude in vitro a montré que l’hémolyse induite par ce dernierétait probablement due à son principal métabolite, l’acide butoxyéthoxyacétique(BEAA). Les hématies humaines sont très peu sensibles à l’effet hémolysantdu BEAA.De nouvelles études épidémiologiques ont confirmé l’effet hypoplasiantmédullaire de l’EGME, l’EGEE et l’EGEEA, en montrant un excès de risquede cytopénies périphériques corrélé à l’exposition chez les travailleurs dedivers secteurs d’activité. Une étude expérimentale établit l’hématotoxicitédu TEGDME chez le rat : chez cette espèce, l’administration répétée defortes doses de l’éther de glycol a induit des diminutions des comptes desplaquettes et des leucocytes, ainsi qu’une atteinte thymique. Une autreétude récente conduite chez le rat confirme l’effet hypoplasiant duDEGDME au niveau de la moelle osseuse et établit sa toxicité pour les organeslymphoïdes.Deux études expérimentales ont confirmé que la toxicité de l’EGME pour lamoelle osseuse et pour les organes lymphoïdes était médiée par ses deuxprincipaux métabolites, l’acide méthoxyacétique (MAA) et surtout, leméthoxyacétaldéhyde (MALD) ; elles ont apporté des arguments en faveurd’un mécanisme apoptotique de l’atteinte des cellules souches. (...)
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